Vue aérienne de Silver Islet

L’histoire étonnante de Silver Islet

Le billet d’aujourd’hui provient de Will Oades, éducateur en patrimoine naturel au parc provincial Sleeping Giant. Photo de l’en-tête: Jeff Robinson.

Avez-vous déjà postulé pour un emploi pour ensuite vous présenter au travail la première aujourd’hui et vous rendre compte qu’il n’est pas du tout comme vous l’aviez imaginé? C’était le cas de nombreux mineurs qui venaient travailler à la mine Silver Islet.

Connue comme étant la mine d’argent la plus riche au monde, le puits de la mine Silver se trouvait sous les eaux glaciales du lac Supérieur; un petit élément d’information, mais considérable que certains mineurs manquaient avant leur arrivée. Bien que la plupart des mineurs restaient pour effectuer le travail pour lequel ils avaient été embauchés, certains trouvaient que voyager dans le centre de la terre, sous des milliards de litres d’eau était un petit peu trop dangereux à leur goût.

La tâche à accomplir

Toute personne qui habite sur le rivage du lac Supérieur, ou qui a vécu à proximité du lac, sait que son eau est incroyablement capricieuse et très tumultueuse. Le lac peut être entièrement calme, puis se transformer quelques minutes plus tard en mer déchaînée qui donnerait la nausée même aux marins les plus aguerris.

Le sentier côtier du lac Supérieur, au nord de l’anse Sinclair

Ces conditions ont créé un trou d’une profondeur de 365 mètres dans le sol, sous le lac, ce qui  rendait la tâche difficile. De plus, pour que la mine soit exploitée, ils devaient protéger l’îlot, et des pompes fonctionnaient constamment pour enlever l’eau au fond du puits de la mine.

Composer avec le lac Supérieur

La Montreal Mining Company, qui était le propriétaire original de la mine, trouvait que cette tâche n’en valait pas la peine, et a ensuite vendu la mine en 1870 à Alexander H. Sibley, le président de la Silver Islet Mining Company. À l’époque, la compagnie montréalaise ne se doutait pas qu’elle venait de perdre l’occasion d’exploiter l’une des mines d’argent des plus fructueuses au monde.

La résidence du président : le siège social d’été pour les actionnaires et les membres de leur famille

Lors de la prise en considération du meilleur plan d’attaque pour protéger la mine des intempéries du lac Supérieur, il était important de tenir compte de toutes les options. Un ingénieur avait suggéré de construire un mur d’une hauteur de 9 mètres autour de l’île de 2 468 m2. Cela aurait coûté deux millions dollars en 1870, une somme exorbitante à l’époque, ce qui serait l’équivalent à environ trente-sept millions de dollars de nos jours.

Quelqu’un d’autre avait suggéré de construire un système de murs moins élevés et de pompes qui coûterait seulement un million de dollars. Toutefois, ces deux options étaient incroyablement dispendieuses et aucune ne pouvait garantir que l’îlot puisse demeurer sécuritaire.

Un  plan saugrenu

Décider d’un plan pour protéger l’îlot était un choix accablant pour la Silver Islet Mining Company et ce n’est jusqu’au moment où William. B. Frue devienne l’ingénieur principal qu’ils ont eu une orientation claire. Le plan de Frue était de bâtir un mur brise-lames afin de protéger l’îlot et d’utiliser une pompe pour enlever l’eau du puits de la mine.

Une photo en noir et blanc d’un îlot doté de divers bâtiments d’exploitation minière
Les bâtiments de la mine à Silver Islet

Ce plan ne coûterait qu’environ cinquante mille dollars et nécessiterait que 34 ouvriers pour le construire et rendre la mine exploitable. Toute personne de l’industrie minière qui entendait qu’une société minière tentait de creuser le sol sous un lac pour exploiter l’argent avec un budget de cinquante mille dollars et seulement 34 hommes trouvait ce plan saugrenu!

Pas une mince tâche

Une photo en noir et blanc du rivage et des bâtiments
Les bâtiments de Silver Islet

Imaginez l’équipe d’athlétisme canadienne courant quatre relais de 100 mètres le long d’une piste de 400 mètres. Imaginez que cette distance descende directement dans les profondeurs du lac Supérieur. Il s’agit de la profondeur approximative du puits de la mine (une profondeur de 384 mètres) et la profondeur approximative que les mineurs devaient parcourir dans le sol chaque jour.

Encore de nos jours, une mine de cette envergure est considérée comme considérable et nécessite énormément de planification et de technologie avancée pour veiller à la sécurité des mineurs. Le puits de la mine était devenu tellement profond que les boisages utilisés ne pouvaient plus soutenir le poids de la masse rocheuse en surplomb.

Une maquette brune des exploitations minières
Une maquette de la mine Silver Islet exposée au Centre des visiteurs du parc provincial

Au lieu de charger le puits de la mine avec des boisages, Frue avait laissé un filon épais d’argent descendant jusqu’en bas du puits de la mine pour alléger la charge du toit. C’était un choix judicieux parce qu’ils finiraient par recueillir ce filon d’argent. Au lieu de payer pour des soutiens supplémentaires, les soutiens finissaient par les payer!

La communication essentielle

La communication constituait un autre obstacle pour la communauté minière de Silver Islet. Aujourd’hui, si vous devez envoyer un message à un ami ou un membre de la famille, cela ne prend que quelques secondes et nécessite peu de réflexion ou d’effort. Pour les mineurs et leur famille de l’époque, le courrier était la seule méthode de communication; par conséquent, il s’agissait du seul moyen de laisser savoir aux membres de la famille au loin qu’ils étaient toujours en vie.

Étant donné qu’aucun chemin ne menait à la communauté de l’îlot, le courrier ne pouvait qu’arriver qu’en bateau ou traîneau tiré par les chiens (lorsque le lac était gelé). Par conséquent, la livraison du courrier était irrégulière et inopportune. Surtout pour Frue, qui devait rester en communication avec Alexander H. Sibley pour exploiter la mine avec succès.

Une photo en noir et blanc d’une bâtisse sombre à deux étages avec un drapeau flottant en avant-plan
Le bureau de la mine avec le drapeau de l’Union royale flottant

Le siège social de la Silver Islet Mining Company se trouvait aux États-Unis. Le courrier traversant la frontière devait d’abord franchir le poste frontalier Pigeon River avant de se rendre aux États-Unis. Si les entrepreneurs postaux refusaient de transporter tout courrier destiné au Canada lors de conflits de travail, cela causait un important manque de communication entre Frue et Sibley.

Heureusement, une entente a été conclue et la situation du transport du courrier s’est réglée, aux frais de la compagnie minière. Une fois que le courrier arrivait, les gens savaient qu’il était arrivé lorsque le receveur des postes hissait le drapeau de l’union royale. Tandis qu’aujourd’hui, les gens ont des avis instantanés sur leurs téléphones leur laissant savoir l’arrivée d’un nouveau courriel qui est probablement envoyé quelques instants avant.

La fin de la mine Silver Islet

Après treize ans d’extraction d’argent sous les eaux glaciales du lac Supérieur, la mine en région éloignée a cessé ses opérations. Un jour, une expédition essentielle de charbon n’a pas été livrée à temps à Silver Islet pour maintenir les pompes d’eau et la mine a été reconquise par le  lac Supérieur.

Une photo en noir et blanc de la communauté insulaire décrépie
Une photo de l’ancienne mine Silver Islet prise en 1890, quelques années après la fermeture

Bien que la mine ait été fermée depuis plus de 100 ans, la communauté insulaire de Silver Islet compte encore quelques maisons des mineurs qui s’y trouvaient à l’époque. Certains de ces bâtiments historiques ont été rénovés et le rivage compte désormais des camps d’été à l’ombre du géant endormi protégeant le puits de la mine enfouie.

Une destination historique

De nos jours, la mine et la région de Silver Islet continuent d’intriguer les visiteurs qui apprécient les possibilités récréatives au parc provincial Sleeping Giant. En fait, sans l’exploitation minière à Silver Islet, aucun chemin n’aurait été construit pour arriver à la  péninsule Sibley et le parc provincial Sleeping Giant ne serait peut-être pas le même aujourd’hui.

Un bâtiment bleu à trois étages sur le rivage
Le magasin général de Silver Islet

Les sentiers récréatifs et les emplacements de camping dispersés à travers le parc sont désormais remplis de rires, de sourires et de moments agréables, qui peuvent rappeler la camaraderie et les liens d’amitié forgés entre les mineurs d’antan.

Si vous êtes intéressé à en lire davantage sur la mine Silver Islet, voici deux livres en anglais sur le sujet: Silver Under the Sea: The Story of the Silver Islet Mine Near Thunder Bay, Ontario, Canada de Helen Moore Strickland et Silver Islet: Striking it Rich in Lake Superior d’Elinor Barr. Ce sont deux livres très approfondis et instructifs qui donnent une perspective unique sur tous les aspects de la communauté minière.