Big Bang et au-delà : les origines astronomiques de l’univers – 4e partie

Dans les trois premiers billets de cette série (1re partie – les origines, 2e partie – la formation des étoiles, et 3e partie – les planètes et les conditions nécessaires à la vie), nous avons abordé nos origines, du Big Bang à la formation de notre système solaire, ainsi que les ingrédients de base qui ont permis la création et l’épanouissement de la vie sur notre planète.

Dans ce dernier billet, nous discutons de ce qui pourrait se passer ensuite. Comme dans les trois premiers billets, nous utiliserons des images prises depuis nos observatoires du parc provincial Killarney.

Toutes les bonnes choses…

Les étoiles se livrent une bataille épique entre deux forces : l’écrasement de la gravité et l’explosion vers l’extérieur des radiations issues de la fusion nucléaire au sein de leur noyau.

Un ciel obscur

Cette lutte acharnée se joue tout au long de la vie de l’étoile. Cependant, lorsque les étoiles commencent à épuiser leur principale source de combustible, l’hydrogène, elles doivent se tourner vers d’autres sources pour générer de la chaleur thermonucléaire. À la fin, les étoiles meurent de différentes manières, en fonction de leur masse au moment de leur formation.

Comme nous l’avons appris dans notre deuxième billet, les étoiles sont créées à partir de boules de gaz chaud qui se sont condensées à partir de nébuleuses.

Toutefois, toutes ces condensations n’ont pas la même masse. Certaines condensations ont formé des étoiles beaucoup plus massives que d’autres. Aujourd’hui, les astronomes ont vu des étoiles aussi petites que 0,1 fois la masse de notre Soleil (OGLE-TR-122b) à plusieurs centaines de fois plus massives (R136a1), avec près de 90 % de toutes les étoiles de masse égale ou inférieure à notre propre Soleil. Parmi les 10 % restantes, peu dépassent 20 masses solaires.

La masse et le destin d’une étoile

La plupart des étoiles passent leur vie sur ce que nous appelons la « séquence principale ». Il s’agit d’une façon de classer une étoile en fonction de sa conversion normale d’hydrogène en hélium.

Les étoiles plus massives ont besoin de plus de chaleur pour résister à leur immense gravité. Elles vivent fort et meurent vite, épuisant leur combustible disponible en quelques dizaines de millions d’années seulement. Cependant, la température de leur surface est très élevée, car leur noyau produit beaucoup de chaleur.

Les étoiles plus petites que notre Soleil peuvent vivre pendant des milliards, voire des trillions d’années. Ces étoiles ont relativement peu de masse qui les écrase et n’ont pas besoin de produire autant d’énergie pour résister à l’effondrement de leur noyau, ce qui maintient leur température de surface plus fraîche.

Les astronomes observent que plus la température de surface d’une étoile est élevée, plus elle apparaît de couleur bleue. De même, plus sa température de surface est basse, plus elle apparaît de couleur rouge. Le tracé de la température de surface en fonction de la masse stellaire est ce qui définit en grande partie la « séquence principale ».

Jusqu’à présent, nous avons décrit les principes de base des étoiles qui convertissent l’hydrogène en hélium et vivent leur vie en fonction de leur masse. Mais ce qui se passe vers la fin de leur vie dépend de leur masse initiale.

Le dernier chapitre de la vie d’une étoile

La fin de la vie d’une étoile semblable au Soleil est fascinante et complexe, et dépasse largement le cadre de cette discussion.

Lorsqu’une étoile comme notre Soleil n’a plus d’hydrogène dans son noyau, elle commence à se contracter et à se réchauffer. Sa couche externe de gaz se gonfle et se refroidit, et elle devient plus rouge dans le processus. Les astronomes appellent ce phénomène une étoile géante rouge.

Une étoile double
L’étoile double « Albireo » telle qu’imagée par le télescope de 0,41 mètre dans le dôme Kchi Waasa Debaabing du complexe de l’observatoire du parc provincial Killarney

L’image ci-dessus de la belle étoile double Albireo montre deux étoiles de couleurs différentes. Leurs couleurs sont directement liées à leur masse et à leur stade de vie.

L’étoile bleue à gauche est une étoile chaude de la séquence principale dont la masse est plus de deux fois supérieure à celle de notre Soleil. La température de sa surface est très élevée, ce qui lui donne sa couleur bleue. En revanche, l’étoile ambrée de droite est un exemple d’étoile qui a quitté la séquence principale et est devenue une étoile géante rouge. Son atmosphère extérieure est devenue plus dense et s’est refroidie, d’où sa couleur rouge. [1]

Les nébuleuses planétaires : de belles étoiles en fin de vie semblables au Soleil

La grande majorité des étoiles semblables au Soleil perdront une grande quantité de matière au cours des derniers millions d’années de leur vie normale.

Cette matière est énergisée par le rayonnement d’une étoile centrale chaude (nous reviendrons sur cette étoile dans un instant) et réémet de la lumière que nous pouvons facilement voir.

Une nébuleuse
M57, la nébuleuse annulaire de la Lyre telle qu’imagée par le télescope de 0,41 mètre dans le dôme Kchi Waasa Debaabing du complexe de l’observatoire du parc provincial Killarney

M57, la nébuleuse annulaire de la Lyre (ci-dessus) est un exemple de nébuleuse planétaire. Ce type de nébuleuse à spectre de raies ressemble à un anneau, mais est en fait de forme sphérique. Les nébuleuses « planétaires » ont été nommées ainsi parce que dans les télescopes de faible puissance de ceux qui les ont observées pour la première fois il y a des centaines d’années, elles ressemblaient à la forme et à la taille relative des planètes.

Cette étoile centrale chaude est ce que les astronomes appellent une naine blanche, le noyau de carbone chaud de ce qui était autrefois une étoile de la séquence principale. Les naines blanches peuvent continuer à briller pendant des milliards d’années, mais elles finissent par se transformer en naine noire, la lueur éteinte de ce qui était jadis une étoile brillante.

La fin de vie d’une étoile gigantesque

Antarès est une étoile rougeâtre visible dans le ciel austral au sein de la constellation du Scorpion. En plus de sa beauté, c’est l’une des étoiles les plus grandes et les plus massives facilement visibles dans le ciel nocturne.

Antarès est presque 700 fois plus grande et plus de 10 fois plus massive que le Soleil. Si l’on plaçait Antarès à la place du Soleil, les planètes Mercure, Vénus, Terre et Mars se trouveraient toutes à l’intérieur de l’étoile! C’est l’une des rares étoiles dont on peut voir la structure à sa surface (voir la première image dans la vidéo ci-dessous).

Les étoiles de la taille d’Antarès, appelées « étoiles supergéantes », peuvent atteindre une telle taille parce que leur immense masse exerce une grande pression gravitationnelle sur leur noyau. Cette pression est telle que chaque étoile peut passer par de nombreux cycles de :

  • compression du noyau;
  • dilatation et refroidissement de son atmosphère extérieure;
  • fusion nucléaire de la matière existante du noyau en de nouveaux éléments (voir le diagramme ci-dessous) [2].
Fusion nucléaire se produisant à différentes couches au sein d’une étoile massive
[2] Résumé fondé sur le tableau « Imaginez l’Univers, les grandes étoiles » de la NASA, tableau 1 (en anglais)

La création du fer : le début de la fin

Vers la fin de sa vie, une étoile massive ressemble à un oignon. Différents types de réactions nucléaires se produisent à différents niveaux de l’étoile, les produits finaux d’une réaction nucléaire devenant les ingrédients bruts de la suivante.

Ce processus se poursuit jusqu’à ce que l’étoile ait produit du fer. La fusion du fer nécessite de l’énergie au lieu d’en produire. Lorsqu’une étoile produit du fer, elle a atteint la fin de sa capacité de fusion nucléaire.

Lorsque le noyau de fer ne résiste plus à l’immense gravité, l’étoile commence à imploser. Sans entrer dans les détails de la physique, toute la matière tombe en cascade et écrase les atomes du noyau. Les protons et les électrons sont poussés ensemble pour former des neutrons. Les neutrons agissent comme un mur impénétrable sur lequel les couches extérieures de l’étoile s’écrasent.

Le choc fait rebondir la matière vers l’extérieur et la fait entrer en collision avec d’autres matières qui continuent de tomber vers l’intérieur. L’énergie de cette collision crée une formidable explosion que l’on appelle une supernova.

Supernova : la fin impressionnante d’une étoile massive

En moins d’un quart de seconde, l’explosion d’une supernova arrache les couches externes d’une étoile. Ces couches contenaient les éléments atomiques formés pendant la vie de l’étoile d’origine, ainsi que des éléments plus lourds formés pendant la supernova elle-même.

L’animation ci-dessous commence par une image de l’étoile Antarès prise par une équipe de l’Observatoire Européen Austral dirigée par K. Ohnaka. Le temps a été accéléré pour montrer le processus d’effondrement de l’étoile sur elle-même.

La coquille colorée de matière éjectée de l’ancienne Antarès représente les différentes couches de produits de fusion dont nous avons déjà parlé. La dernière image est celle des vestiges de supernova que nous appelons les dentelles du Cygne. Cette image vous semble-t-elle familière? Il s’agit des mêmes vestiges de supernova que nous avons décrits dans le premier billet de cette série.

Avec cette dernière image, nous avons bouclé la boucle de notre voyage. Les supernovæ laissent leurs vestiges dans le milieu interstellaire. Ces matières entrent en collision avec les nuages de gaz existants, les enrichissant ainsi et relançant le processus de formation d’étoiles.

Un spectacle de lumière intergalactique

Les supernovæ sont des événements étonnants qui peuvent illuminer une galaxie entière pendant des semaines. Elles libèrent plus d’énergie au cours de leur durée de vie de 40 jours que le Soleil n’en produira au cours de sa vie entière de 10 milliards d’années.

Deux étoiles visibles dans l’hémisphère nord, Antarès et Bételgeuse, sont de bonnes candidates pour devenir des supernovæ.

Vous trouverez ci-dessous une image prise avant et pendant une supernova relativement proche qui s’est produite en 1987. Elle a été observée pour la première fois par l’astronome canadien Ian Shelton de l’Université de Toronto à l’observatoire de Las Campanas.

Une supernova
Image de la supernova 1987a (supernova Ian Shelton). Photo de l’Observatoire astronomique australien : David Malin

Revenir sur Terre

Pensez à la dernière fois que vous vous êtes réunis autour d’un feu de camp avec vos amis et votre famille.

Vous avez profité de la chaleur du feu, vous vous êtes baigné dans sa lumière et vous avez été hypnotisé par sa lueur vacillante. Après une merveilleuse journée de randonnée, de canot et de baignade dans « votre » parc, vous étiez imprégné de la beauté de la terre, mais un mystère planait toujours au-dessus de votre tête.

Dante Alighieri a écrit dans son œuvre du XIVe siècle, La Divine Comédie, « Les cieux vous appellent et tout autour de vous font tournoyer leurs éternelles beautés, et votre regard persiste à contempler le sol ».

Nous espérons que cette série en quatre parties vous aura donné l’occasion de lever les yeux vers le ciel au-dessus de vous tout en vous permettant d’apprécier davantage la vie et le sol en dessous.

La prochaine fois que vous serez assis autour d’un feu de camp dans l’un de nos nombreux parcs provinciaux, prenez un moment pour regarder vers le ciel et pensez au lien entre le feu devant vous et les « feux » dans le ciel.

Ceci met fin à notre série sur les origines astronomiques de l’univers. Si vous n’avez pas eu l’occasion de lire tous les billets, nous vous encourageons à revenir en arrière et à commencer par le début de cette série.

[1] À l’exception de quelques images prises à l’aide de techniques spéciales ou du télescope spatial Hubble, nous ne pouvons pas voir ni photographier les étoiles autrement que comme des points lumineux. Sur cette image d’Alberio, la taille de l’étoile n’est qu’un artefact photographique et ne doit pas être considérée comme indiquant sa taille physique réelle.