engoulevent bois-pourri.

Sauver ce qu’on ne peut pas voir : gérer l’habitat de l’engoulevent bois-pourri à Pinery

Pour certains, c’est le chant de l’été. Pour d’autres, c’est le chant qui signale une tragédie imminente. Il faisait partie de ce qui rendait Hank Williams (si) solitaire, mais bon nombre considèrent que sa présence est bien trop ambiante.

Malgré votre interprétation, il est facile d’apprendre ce chant classique de l’engoulevent bois-pourri.

Oiseau très bien camouflé, actif lors des chaudes nuits estivales, l’engoulevent bois-pourri est beaucoup plus souvent entendu que vu. Son chant onomatopéique distinctif est un élément de base sur les terrains de camping du parc provincial Pinery.

Cependant, la présence de l’engoulevent bois-pourri ne devrait pas être tenue pour acquise. Ses chants s’affaiblissent dans notre région.

Heureusement, grâce à l’aide des Amis du parc Pinery et du programme d’intendance de l’habitat, Pinery est dans une position unique pour remédier à ce déclin.

Le « vocifère »

Le nom latin de l’engoulevent bois-pourri est encore plus descriptif que son nom commun : Antrostomus vociferus, qui se traduit librement par « engoulevent vocifère ».

L’oiseau est certainement bruyant, puisqu’il chante jusqu’à cinquante-neuf fois par minute, avec des périodes de chant pouvant durer jusqu’à quinze minutes. Pour les personnes qui tentent de se reposer après une journée dans le parc, les choses s’annoncent plutôt bruyantes.

L’engoulevent cherche de la nourriture la nuit, se servant de son grand bec caverneux pour attraper des insectes en vol. Son bec est également bordé de moustaches hérissées qui pourraient l’aider à détecter le mouvement de la proie devant lui.

Se nourrissant exclusivement d’insectes, dans l’obscurité et sans l’aide de l’écholocalisation, l’engoulevent utilise une combinaison d’adaptations visuelles pour chercher efficacement de la nourriture.

 

Un engoulevent bois-pourri sur une branche.
Les longs poils ressemblant à des moustaches de l’engoulevent bois-pourri peuvent l’aider à capturer des insectes. Photo : Terry Crabe

Ses grands yeux foncés recueillent la lumière disponible, ce qui lui permet de voir ses proies dans des conditions de faible luminosité. Une partie de la lumière est réfléchie vers sa rétine par une membrane réfléchissante, le tapis choroïdien, qui améliore sa vision nocturne et crée une lueur orange visible dans ses yeux.

En fin de compte, le succès de l’alimentation de l’engoulevent bois-pourri dépend de la vision et nécessite des espaces ouverts. Par conséquent, l’engoulevent bois-pourri se nourrit et niche souvent à la lisière des zones boisées, des zones humides faiblement arborées et des savanes.

Une espèce chérie

Selon la tradition Temagami Ojibwa, le chant de l’engoulevent bois-pourri porte malheur à celui qui l’écoute. Cependant, l’absence croissante de chants de l’engoulevent bois-pourri dans notre région devrait être encore plus préoccupante pour tout le monde.

La perte d’habitats adéquats et la réduction globale des insectes proies disponibles sont les principales causes du déclin de l’engoulevent bois-pourri. Cette espèce est classée comme menacée en Ontario, les populations diminuant d’environ 2,7 % par an.

Un engoulevent bois-pourri dans l’herbe.
Un engoulevent bois-pourri faisant la démonstration d’une « aile brisée ». Ce comportement est simplement un acte visant à distraire les prédateurs potentiels et à détourner leur attention du site de nidification.

Le déclin dans le Sud-Ouest de l’Ontario est évident. La conversion de la région à l’agriculture, conjuguée à l’utilisation intensive d’insecticides à large spectre, a chassé les engoulevents bois-pourri de leurs anciens lieux de prédilection.

Aujourd’hui, la présence des engoulevents bois-pourri dans la région se limite essentiellement aux quelques parcelles d’espace naturel restantes, dont le parc provincial Pinery.

Si nous voulons préserver la place de cette espèce dans le Sud de l’Ontario, Pinery devra trouver des moyens d’accueillir et de soutenir le rétablissement de cette population à risque.

Une lumière dans l’obscurité

Les habitats appropriés restants, dont la savane de chênes de Pinery, sont menacés par la propagation de plantes envahissantes, qui peuvent rapidement dominer le sous-étage de la savane. Au fil du temps, ces envahisseurs ferment la forêt et réduisent les espaces ouverts dont a besoin l’engoulevent bois-pourri pour chercher de la nourriture.

brosse à bottes
Utilisez les brosses à bottes au départ des sentiers de Pinery pour nettoyer vos bottes et aider à arrêter la propagation des espèces envahissantes.

En réponse, le parc a tenté de freiner la propagation des plantes envahissantes au moyen de brûlages dirigés, de l’enlèvement direct des plantes et de l’installation de brosses à bottes au départ des sentiers.

Tous ces efforts semblent porter fruit!

Au cours de la dernière décennie, l’occupation de l’engoulevent bois-pourri dans le parc a augmenté d’environ 3,2 % par an. Cependant, nous pouvons faire plus pour nos engoulevents bois-pourri.

Entre en scène le programme d’intendance de l’habitat.

Ce programme est administré par les Amis du parc Pinery. Ensemble, notre objectif est de créer un habitat pour les espèces en péril, comme l’engoulevent bois-pourri et bien d’autres, qui ont besoin de forêts ouvertes pour survivre.

Deux œufs d’engoulevent bois-pourri sur le sol.
Un nid typique de l’engoulevent bois-pourri. En Ontario, les engoulevents bois-pourri ne pondent souvent que deux œufs par an sur à peine plus qu’une dépression sur le tapis forestier.

Le programme d’intendance de l’habitat fournit des biens supplémentaires utilisés pour créer un habitat productif. Il se concentre principalement sur l’élimination des plantations de pins historiques du parc, la création d’un habitat de nidification et la surveillance des espèces en péril dans le parc Pinery.

Grâce aux efforts continus de Pinery et à l’aide du programme d’intendance de l’habitat, nous ramenons de la lumière dans des espaces trop sombres pour que les engoulevents bois-pourri puissent s’y nourrir, nicher et proliférer!

Mêmes paroles, autre chant

Le rétablissement à long terme nécessite un habitat approprié, et Pinery en est un fournisseur clé. Il n’est pas facile de créer et de maintenir ces habitats, mais quelques gestes simples peuvent grandement contribuer à la protection de ces oiseaux.

Les visiteurs de Pinery peuvent contribuer de bien des façons au rétablissement des engoulevents bois-pourri :

Tout d’abord, limitez la propagation des plantes envahissantes en utilisant les brosses à bottes que l’on trouve au départ des sentiers du parc, et évitez de sortir des sentiers lors de vos randonnées pédestres.

Non seulement le fait de rester sur le sentier limitera la propagation des espèces envahissantes, mais cela évitera aussi de déranger les engoulevents bois-pourri qui nichent à terre.

randonneuse assise sur un banc à côté du sentier

Le maintien d’habitats ouverts, qu’il s’agisse de refuges pour les insectes comme les zones humides ou de lieux de nidification comme la savane, contribuera à accroître la population d’engoulevents bois-pourri.

Soyez consciencieux dans l’utilisation des insecticides. Choisissez des produits qui assurent une protection adéquate et ciblée des plantes souhaitées tout en préservant la communauté d’insectes.

Un engoulevent de l'Est vu en train de couver ses œufs l'année dernière au parc provincial Pinery.
Un engoulevent bois-pourri vu en train de couver ses œufs l’année dernière au parc provincial Pinery.

Enfin, le fait de garder les chats à l’intérieur élimine le risque que les engoulevents bois-pourri et leurs œufs deviennent un festin félin. En tant qu’oiseaux qui nichent à terre, les engoulevents bois-pourri et leurs petits sont extrêmement vulnérables à la prédation.

Observer et signaler

Si vous observez des engoulevents bois-pourri chanteurs au cours de votre visite, ne les approchez pas et ne les dérangez en aucune façon.

Signalez-les plutôt à des projets de science citoyenne comme eBird, iNaturalist et NatureCounts, ou directement au centre d’accueil.

La contribution à la surveillance active des engoulevents bois-pourri aidera les chercheurs à suivre les tendances actuelles de la population.

Vous pouvez également envisager de faire un don à Parcs Ontario ou de devenir membre des Amis du parc Pinery pour soutenir des initiatives comme le programme d’intendance de l’habitat qui protège activement les espèces en péril et leurs habitats.

Un oisillon d’engoulevent bois-pourri.
Un oisillon d’engoulevent bois-pourri. Les jeunes de cette espèce sont semi-précoces, ce qui signifie qu’ils peuvent se déplacer de façon indépendante après l’éclosion, mais qu’ils dépendent toujours de leurs parents pour l’approvisionnement en nourriture.

Ici, à Pinery, le cri de l’engoulevent bois-pourri est un signal de notre gestion de l’habitat à l’œuvre. Il nous remplit de joie et de fierté.

Ouvrez grand vos oreilles la prochaine fois que vous visiterez le parc. Nous espérons que vous entendrez le cri obsédant de ces oiseaux, et que vous vous joindrez à nous pour aider à protéger cette espèce spéciale.